dimanche 15 juillet 2012

L'aller + le retour en cargo = 99 jours sans notre Land Rover



Après 5 voyages et 100 000 km nous sommes repartis en novembre 2011 pour un 6e voyage en Amérique du Sud.

A L’ALLER, le Grande Argentina se présente au Havre avec déjà plus d’un mois de retard. Nous embarquons le 7 novembre 2011 et après 32 jours à bord (dont 1 semaine de réparations sur la coque à Dunkerque), nous arrivons à Rio de Janeiro où nous devons abandonner nos 5 véhicules sur le quai. Ils seront chargés dans le cargo suivant car le Grande Argentina ne va pas plus loin mais repart en Europe.
Le 9 décembre, à Rio de Janeiro la compagnie nous expédie à Buenos Aires en avion avec les 6 autres passagers et prend en charge : taxis, billets d’avion, hôtel, restaurants. C’est normal, nous voyageons, en principe accompagnés de nos camping-cars, en pension complète jusqu’à Buenos Aires…
Samedi 10 décembre. A la télé c’est la cérémonie d’investiture de la présidente argentine Cristina Kirchner nouvellement réélue.
Les relations sont exécrables entre l’Angleterre et l'Argentine. Ce sera bientôt la commémoration du 30e anniversaire de la guerre des Malouines (ou Malvinas ou Falkland). Situées à 500 km de l’Argentine, les Anglais les ont colonisées au XIXe siècle et refusent de les abandonner aux Argentins. Elles furent le théâtre d’une guerre meurtrière voici 30 ans. Cette bataille perdue galvanise les réactions nationalistes des Argentins. Peuplé de 3 000 habitants et de troupeaux de moutons, cet archipel renferme aussi du pétrole… Pour tenter de les récupérer, la présidente argentine a entamé une guerre d’usure pour nuire aux intérêts de la Grande Bretagne par tous les moyens. Et comme certains des 80 navires de Grimaldi (dont le Grande Argentina) sont immatriculés à Gibraltar, territoire anglais, nous en subissons les conséquences.

GRIMALDI JOUE AVEC NOS NERFS
L’un des passagers va chaque jour aux nouvelles, mais rien ne vient. Sur le site www.trafficmarine.com nous pouvons parfois suivre l’étrange parcours du Grande San Paolo qui, avons-nous appris, transporte nos véhicules. Après plusieurs jours à l’arrêt dans le rio de la Plata au large de Montevideo, il passe une première fois devant Buenos Aires sans s’arrêter, remonte le rio Parana plus haut que Zarate, où il reste 2 jours puis redescend et repasse une 2e fois devant Buenos Aires sans s’arrêter, puis stationne au large de Quilmes, repasse une 3e fois devant Buenos Aires sans s’arrêter, remonte pour la 2e fois le rio Parana jusqu’à Zarate, imaginez l’attente les bagages prêts, le stress...

FAUX DÉPART
Mercredi 28 décembre. Grimaldi a réservé 2 taxis pour emmener les 5 passagers conducteurs à l’escale de Zarate (à 100 km) afin d’y récupérer nos camping-cars, pendant que les épouses patientent à l’hôtel avec les bagages bouclés.
A la douane de Zarate, après une matinée de démarches avec l’aide d’un agent de Grimaldi, à midi il reste un papier à faire mais le bureau ne rouvre qu’à 13 heures. Le moral est bon, nous allons pouvoir enfin commencer nos périples avant Nouvel An. Mais à 12 h 15 on vient nous dire que nos véhicules sont restés dans le Grande San Paolo qui est en route pour la capitale. Imaginez notre déception et celle de nos épouses. Et l’écœurement de celles qui devront déménager, emporter les bagages dans un autre hôtel, car ils ont rendu nos 5 chambres. Par chance, 2 n’avaient pas été relouées, dont la nôtre. La communication entre les bureaux de Grimaldi à Buenos Aires et leurs navires n’est pas non plus leur point fort ! A Buenos Aires, ils nous disent que la douane ferme demain soir jeudi pour 4 jours à cause de Nouvel An ! L’écœurement est à son comble.
Le Grande San Paolo transportait également des véhicules du Dakar. Ce qui explique en partie son étrange parcours. Il les a déchargés plus haut que Zarate, dans un port réquisitionné à cette occasion.
Le 3 janvier 2012, 58 jours après avoir embarqué au Havre nous récupérons enfin et sans frais nos 5 camping-cars, après 26 jours d’attente à l’hôtel, dont Noël et Nouvel An.
Mauvaise surprise, certains ont été volés et l’un d’eux pillé et vandalisé. Ça arrive souvent quand on n’accompagne pas et qu’on doit laisser nos clés pour que des chauffeurs les chargent et les déchargent. Pour faire l’inventaire de ce qui nous a été volé, nous allons tous ensemble au petit camping L’Hirondelle de Tigre où nous retrouvons avec plaisir Beatriz et Angel, toujours aussi accueillants, et d’autres touristes français.

A ceux qui pensent que Grimaldi nous a gâtés en payant pour nous hôtel et restaurants jusqu’à l’arrivée de nos véhicules, nous répondons que cela correspond à leur engagement de nous transporter en pension complète avec nos véhicules du Havre à Buenos Aires.
Notre but était de traverser l’Atlantique en environ un mois puis de réaliser un parcours terrestre dans nos camping-cars où le logement ne nous coûte rien et où on prépare nous-mêmes nos repas de façon économique, plutôt que vivre aux crochets de la compagnie sans rien pouvoir faire d’autre qu’attendre. Ce retard considérable a coûté à Grimaldi mais ne nous a rien rapporté, il a anéanti nos projets.

Après en avoir débattu tous les 8, certains passagers allemands, qui maîtrisent bien l’anglais, ont négocié pour nous tous et obtenu de la compagnie, en dédommagement pour ce voyage raté, une remise substantielle sur le voyage de retour. C’était de sa part la reconnaissance de sa responsabilité dans le préjudice que nous avions subi.

A noter que les touristes qui étaient partis d’Europe en avion en expédiant leur véhicule en fret ou en container ont attendu comme nous mais n’ont eu droit à aucune indemnité ni prise en charge de leurs frais d’hôtel, etc.

Ecœurés de ne pas pouvoir réaliser notre projet d’aller jusqu’au Pérou et en Equateur faute de temps, en février nous avons décidé de rentrer. Réservation auprès de Mme Catalina pour un départ prévu sur le Grande Africa le 29 mars, donc arrivée prévisible au Havre fin avril.

LE RETOUR
A Buenos Aires, nous avons déjà attendu 10 jours avant d’embarquer à bord du Grande Africa, le 9 avril. Pas de chance, il est lui aussi immatriculé à Gibraltar et les autorités argentines retardent volontairement notre bateau, confisquant nos passeports et ceux de l’équipage.
A Rio montent 4 Brésiliens, des solides gaillards présentés par des officiers (suédois) comme des gens qui sont là pour notre sécurité (serions-nous en danger ?). En fait ils escortent 3 Noirs prisonniers, des jeunes Sierra Leonais, passagers clandestins décidés à quitter leur pays, l’un des plus pauvres du monde, qui étaient montés à l’aller à Freetown. Ils avaient été débarqués et retenus prisonniers au Brésil avant d’être reconduits dans leur pays dans le Grande Africa qu’ils avaient pris à l’aller, où ils sont de nouveau prisonniers. Ils sont enfermés dans la prison du navire et quand nous nous inquiétons de la raison de leur présence et de leur sort, des officiers viennent nous dire de partir, interdiction de parler aux prisonniers, ordre du capitaine, que ces gens pourraient être dangereux, qu’ils pourraient entre les barreaux de la porte nous attraper par un bras… (et peut-être aussi nous bouffer ???) Ayant échangé nos adresses mail, nous avons su depuis qu’ils sont bien rentrés chez eux.
Nous passerons 41 jours à bord avant de débarquer à Anvers, le 19 mai, l’escale du Havre étant supprimée et le Grande Africa retiré de la ligne.
Nous avons déjà pris le Grande Brasile, le Repubblica del Brasile, le Grande Buenos Aires (2 fois), Grande Argentina, Grande Amburgo dont nous n’avons pas eu à nous plaindre.
Bien sûr un cargo n’est pas un bateau de croisière. Les dates ne sont pas garanties, la priorité c’est le fret, pas les passagers. On leur doit malgré tout certaines prestations : un minimum de considération, la communication des modifications de parcours autrement que par un papier en anglais qu’on fait passer, une cabine correcte (nous avons dû en changer 3 fois !), propre et en bon état et des éléments de confort tels que ceux décrits dans les prospectus de Grimaldi.
Le Grande Africa est en piteux état, en travaux, une partie du mobilier est absente et le reste n’est pas fameux. Au lieu de manger dans le mess des officiers on nous a mis dans le salon transformé en réfectoire, qui ne contient rien d’autre qu’un buffet bas, pas de fauteuils, ni canapés, ni tables, ni télévision. Les tables sur lesquelles nous mangions conviendraient mieux dans mon garage, le salon est devenu une sorte de cantine. On se sert soi-même dans le mess des officiers, lui aussi en chantier, où on a le choix entre plusieurs plats. Une fois le repas fini on débarrasse. Mais on ne fait pas encore la vaisselle… C’est la première fois que ça nous arrive. Les heures des repas sont très spéciales sur ce navire : 7 h 30, midi, 17 heures. Quand on est diabétique et qu’on doit avaler des cachets à chaque repas, ils devraient être correctement espacés.
De plus les réserves de nourriture s’épuisant, le cuisinier philippin faisait ce qu’il pouvait avec ce qui lui restait.
Au bout d’une vingtaine de jours plus d’eau minérale mais de l’eau de mer dessalinisée, plus de jus de fruits, plus de fruits sauf des pommes, plus de légumes frais mais de patates et du riz à tous les repas, en guise de crudités des pickles, de la mayonnaise en bocaux à la place du beurre au petit déjeuner, des œufs en quantité impressionnante mais aucun achat pendant les escales. Le ravitaillement se fait uniquement à Anvers. Ils auraient quand même pu se réapprovisionner aux escales brésiliennes, à Dakar puis à Hambourg ou même à Londres ! Nous n’avons heureusement pas souffert de la faim, mais faute d’approvisionnement les repas se ressemblaient de plus en plus.
C’est lamentable vis-à-vis des passagers qui ont payé pour des prestations hôtelières correctes, cette 7e traversée a été pour nous minable, c’est la première fois. J’ai fait des photos pour en témoigner. Quand un hôtel est en travaux, il est fermé. Et l’équipage était malheureusement aussi mal servi que nous !

CONCLUSION
Grimaldi a anéanti notre 6e voyage, qui était le dernier en Amérique du Sud. Et comme vous le savez, on ne vit qu’une fois !
La moitié : 3 mois et une semaine (99 jours) en navigation ou en attente à l’hôtel et autant à nous balader en Land Rover en Argentine et au Chili.
Découragés après tout ce temps perdu, la majorité des passagers du Grande Argentina sont comme nous rentrés dans les 3 mois.
Nos 2 premières traversées en 2003 et 2004 avaient duré au total 53 jours, dont 26 jours à l’aller et 27 au retour. Cette fois nous avons mis 46 jours de plus.
Heureusement les passagers et les équipages étaient agréables à l’aller comme au retour et, la mer calme.
Pendant notre périple terrestre pas de panne malgré ou grâce à l’âge de notre Land Rover qui vient d’avoir 18 ans (donc dépourvu d’électronique). Nous avons fait encore de belles rencontres et retrouvé des amis.
L’Argentine réduit ses importations et Grimaldi subit de plein fouet les conséquences de la diminution du fret sur la ligne Europe/Buenos Aires et supprime des navires, provoquant des retards et annulations pour les passagers. En ce moment traverser l’Atlantique pour rejoindre l’Amérique du Sud avec son camping-car est devenu bien difficile.

Bonne chance à ceux qui partent ou qui rentrent, ils en auront besoin…

 

1 commentaire:

  1. bonjour, votre récit est passionnant - j'ai moi-même effectué un aller avec le grandé Brasil et le retour 9 mois plus tard avec le Grande Buenos Aires. Même bateau (même N° de cabine) -question bateau aucun problème...mais au niveau du commandement c'est pas pareil!!! à l'aller c'était sous pavillon suédois - un équipage aux petits soins - nous étions des rois !!! un capitaine son second - for mi da bles. Au retour commandement et pavillon italien - pas sympa du tout - les passagers n'existaients pas - la bouffe dégueu. les escales : connait pas - pas de descente.à terre!!! même le service du buanderie était cata. Pour ce qui est des pillages sur les véhicules: c'est du classique - les véhicules qui traversent sans accompagnements sont pratiquement toujours pillés - A l'aller le capitaine suédois nous avais informé, et nous avions au cours de certaines escales, assuré des quarts pour surveiller nos véhicules - ce qui n'a pas empêché que des véhicules non-accompagnés soient visités - il faut voir avec quelles agilité et rapidité cela s'opère. Je compte redescendre cette hiver sur l'argentine et m'a-t'on dit , il n'a a pals d'escale à Buenos Aires. bon vent...bons voyages....

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